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Cultivons la curiosité

Silent Voice

Silent Voice

Il fût un temps, en terme de jeux vidéo, où l'Europe (et donc la France), était la dernière roue du carrosse. Se retrouver à obtenir un "Super Marios Bros. 3" a un an de la sortie de la Super Nintendo, patienter une ou plusieurs année(s) pour avoir un Final Fantasy traduit, et j'en passe. Depuis quelques temps, ça va mieux, limite on a les jeux avant le Japon. Mais concernant l'animation de l'archipel, c'est encore délicat. Rares sont les films faisant beaucoup d'entrée, et malgré la prise de risque de la part de @Anime qui essaie au maximum de sortir les films en salles, l'offre est peu nombreuse. Hors cette fois-ci Art House nous offre l'adaptation du manga de Ôima Yoshitoki "A Silent Voice". Ici, nous avons un titre qui perd une particule, mais peu importe. Réalisé par Yamada Naoko et écrit par Yoshida Reiko, ce film a mis 2 ans, jour pour jour, pour être vu en salle obscure par votre serviteur. Sachant qu'il est sorti plus tôt au mois d'Août 2018 en France. Ce sera en VF et à un horaire peu habituel (j'avais l'habitude de 18h30, mais 18h15 jamais) que j'ai vu ce film, qui est passé de façon inespéré dans mon cinéma. Et autant vous dire que je n'ai pas regretté les 2h10 à venir.

Vidéo de FilmsActu.

"A Silent Voice" est donc un manga en 7 tomes, édités chez Pika Édition en France. Alors comment faire un film, malgré une durée de 130 minutes, qui n'oublie rien ? Et bien je ne pourrai pas répondre à cette question, sachant que je n'ai pas encore lu le matériaux d'origine. Oui, je les ai, mais pas encore lu. Du coup, l'avantage, c'est que je ne comparerai pas avec le support papier. Mieux, ce dernier étant plus "long", ça me permettra d'approfondir certains points, et donc de savourer encore plus le manga.

Déjà, premier point, nous n'avons pas de sentiment de coupe franche. Tout est cohérent, agréable, fluide. L'animation, sans être exceptionnelle est efficace. Il en va de même pour les décors (pas de tableau à couper le souffle comme chez Hosoda Mamoru). Pourtant, comme je l'ai dit, tout y est cohérent et on ne tarde pas à plonger dans ce monde.

Mais de quoi il en retourne. Sachez que je ne pourrai pas rendre un hommage brillant à ce film, tant il est marquant, et que je risque de dire de la merde, pas contre lui, mais en me mélangeant les pinceaux. Retenez un truc. Il est à voir. Voilà qui est fait. Nous pouvons donc parler du scénario. Dans une classe de dernière année de primaire, Ishida est la petite brute ayant pas mal d'amis. Alors quant la sourde Nishimiya arrive et commence à taper sur les nerfs de toutes et tous, il sera le premier à lui faire subir des brimades. Passant de la moquerie puérile jusqu'à la violence physique.

Oui, on parle de handicap, mais aussi de harcèlement scolaire. Sauf que le thème principal est plus le suicide selon moi. Les autres aspects abordés dans le film étant des faits menant à cet acte ultime. Je sais, si vous avez vu le film, vous vous dites que je déconne, mais pourtant, pour moi, le thème central c'est ça. D'ailleurs le film ne débute-t-il pas par Ishida mettant en place sa fin de vie ? Car sans que l'on sache pourquoi, nous voyons ce jeune adolescent se préparer au grand saut.

Et tandis qu'il fait marche arrière (avec une scène familiale mémorable), il va tout faire pour être ami avec Nishimiya, celle qu'il a tant maltraitée en primaire. Seulement, si on parle beaucoup de Nishimiya et Ishida, les autres personnages sont tous aussi importants. Ainsi, tout le monde se moquera de Nishimiya dans son dos, avec son cahier pour communiquer. On verra que Ueno en aura marre de cette handicapée qui ne fait que la retarder, ce qui poussera plus ou moins Ishida à maltraiter la sourde.

D'ailleurs, on constate, et c'est important pour la suite, que tout le monde se moque de Nishimiya. Je l'ai déjà dit, mais hormis Sahara qui deviendra amie avec elle, la pauvre Shôko ne se rendra pas compte de ce qu'il se passe. Le pire intervient quand Ishida (parfois assisté par Ueno), arrache les aides auditives de Shôko, blessant celle-ci. On arrive à comprendre sans comprendre en fait, pourquoi ces enfants font ça.

Seulement, quand Nishimiya quitte l'école, ses "ami.e.s" se retournent contre Ishida, ainsi il devient le fautif principal, et devient ainsi l'élève isolé dont tout le monde se moque. Là aussi on constate une forte hypocrisie de la part des élèves, qui rejettent sans rechigner la faute sur Ishida, hors elles et eux aussi ont participé. Après avoir connu des années Collège compliquées, Ishida décide d'en finir, surtout après avoir vu sa mère souffrir quand elle fût obligée d'aller payer les dégâts commis par son fils.

Ici, on constatera une scène hors champ violente. La mère de Ishida revient avec les boucles d'oreilles arrachées. Une des nombreuses scènes marquantes. Alors quand quelques années plus tard, Ishida décide d'en finir, il revend tout ce qu'il possède pour rembourser sa mère. En plus entre temps il a appris le langage des signes, uniquement pour savoir si Shôko va bien. C'est d'ailleurs le jour où il décide d'en finir qu'il renoue le contact avec Nishimiya.

Après avoir abandonné l'idée de mettre fin à ses jours, Ishida va tout faire pour se racheter. Peu lui importe d'être le rebut du Lycée, il veut rattraper ses erreurs, et fait tout pour. Il rencontrera le petit ami de Nishimiya (dont la vraie identité se devine), et dès lors il essaiera de revivre. Remontant au fur et à mesure de son trou qu'il a lui-même creusé. Il renouera même avec des ancien.ne.s ami.e.s (en plus du nouveau).

Je n'en révèle pas plus, ceci n'est que le premier quart du film, qui a encore tant à révéler. Il y sera question de fugue d'enfant, de familles monoparentales (on ignore ce que sont devenus les pères de Ishida et Shôko), mais aussi d'être en mesure d'assumer ses responsabilités. Que seules Ishida et Ueno ont conscience. Cette dernière est abjecte, le reconnait, et ne changera jamais (sauf sur la fin avec le langage des signes "Idiote"). Ainsi, Sahara est peureuse et lâche, le nouvel ami de Ishida (j'ai paumé son nom pardon) est lourd, mais très touchant. La pire restant Kawai, qui, pour moi, est la plus dégueulasse du lot, elle ne reconnaitra jamais ses erreurs passées, pire, elle dira avoir été amie avec Nishimiya (faux, c'était Sahara) et l'avoir défendue (re-faux, elle rigolait des blagues douteuses de Ueno). Et re-pire, elle fond en larme quand on lui lance dans la gueule qu'elle était la première à être inactive quand Shôko se faisait agresser. Faisant souvent passer Ishida comme le grand méchant de l'histoire, elle n'assumera jamais sa part de responsabilité, assez flippante la fille.

Heureusement, il n'est pas question que de drame. Ainsi, la partie familiale des Ishida est sympa. Quand la mère de Shôya (prénom du "héros" de l'histoire) lui parle toute penaude de la tentative de suicide de son fils, avant de péter un câble. C'est surtout Maria, nièce de Shôya qui apportera une douceur bienvenue. Je ne parle même pas du personnage "petit ami" de Shôko, exceptionnel aussi, et ultra touchant. Le copain de Shôya sera aussi marrant, se battant avec une des nouvelles connaissances de Ishida, mais de façon drôle.

Comment arriver à trouver un tel équilibre, entre drame et comédie ? Je l'ignore. J'ignore aussi si Ôima Yoshitoki arrive à aussi bien le faire dans son manga, mais ici Yamada Naoko s'en sort à la perfection. Elle trouvera toujours le ton juste, sans jamais partir dans le lacrymale ou l'explosion de rire. Tout est touchant, vous arrachera un sourire bienveillant, ou une toute petite larmichette. Surtout, ici le handicap n'est pas.... handicapant pour les spectatrices/teurs (désolé, blague pas drôle). Et de façon surprenante, la VF s'en sort parfaitement bien. On aurait pu avoir peur que le ton soit trop dramatique, poussant la fable contre les méchantes personnes valides alors que les handicapé.e.s souffrent, mais ici non, tout le monde souffre. En ça, il n'y a pas de manichéisme, et comme le dit si bien Ueno à Shôko, cette dernière est énervante à toujours s'excuser, toujours dire que c'est de sa faute. Elle ne semble n'avoir aucun caractère, et j'avoue avoir eu beaucoup de mal à comprendre son geste après les feux d'artifices. Oki, elle l'explique, mais je n'arrive pas à comprendre.

La VF, hormis quelques passages bizarrement plus traduits que localisés (la mauvaise compréhension sur la Lune par exemple), et bien elle retranscrit bien l'émotion, sans jamais en faire des tonnes. Le handicap des sourds et excellemment bien retranscrit lui aussi, relativement proche de la réalité, et ne gêne absolument pas. Les voix sont bien choisies et jamais on se retrouve sorti du film pour un truc mal joué ou mal dit, du très joli travail.

Par contre, je n'ai pas pris de tarte visuelle. Le chara design est très joli, les décors aussi, mais rien de foufou, pas d'effet dingue, sauf l'eau. Je sais, au final c'est vraiment très beau, mais je ne me suis pas pris une claque comme devant la beauté visuelle de "Ame & Yuki : Les enfants loups". D'accord, le passage des feux d'artifice est sublime, mais bon, c'est un peu le seul passage bluffant du film. Il faut dire que l'on s'attarde plus sur le récit qu'autre chose. Je me répète encore, le tout est fluide et joli, je ne le trouve pas moche, c'est juste que j'en attend un peu plus au cinéma. C'est con, je sais, et je ne le nie pas.

Une claque narrative. Un scénario plus proche de la comédie dramatique, qui ressemble au choc de "Fireworks" mais en moins pudique et nettement plus agréable. Il y est pourtant question de cette jeunesse Japonaise perdue, thème central de "Colorful" mais ici beaucoup moins choquant. On ressort de la salle ému.e, impressionné.e. Pour peu que vous vous identifiez à certains personnages (comme moi), c'est mort, ce film vous marquera. Entre "BlacKkKlansman" et "La forme de l'eau", voilà 3 films marquants pour 2018. Je vous les conseille tous les trois, en me disant que le film de Guilermo Del Toro reste le meilleur film de 2018 pour ma part, alors que celui de Spike Lee devient troisième, passant derrière "Silent Voice" donc. Un film à voir, il me tarde de le voir en VOSTFr, malgré une très bonne VF. Si vous avez la chance d'avoir un cinéma le diffusant, n'hésitez pas une seule seconde, un très grand film. J'ai adoré.

@+

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